"Il est souhaitable et possible de faire de la croissance écoresponsable sans ce que ce soit du greenwashing" (Stéphane Cohen, fondateur de Hublo)
Entretien de novembre: Stéphane parle notamment de la création d'une société nativement à mission dans le secteur du pressing; de l'alliance entre technologie et proximité; et de changer son secteur
Chère lectrice, cher lecteur,
J’espère que certains ont pu profiter d’un viaduc, comme on dit. Maintenant que les ponts et vacances scolaires sont terminés, il est temps de vous envoyer l’entretien du mois avec Stéphane Cohen, fondateur du pressing Hublo, société nativement à mission.
Hublo, j’en ai parlé il y a longtemps au moment du lancement de l’entreprise. Le format de La Machine à sens était bien différent à l’époque. Le fruit du hasard a fait qu’Adama m’a sollicité pour un entretien et que je ne vous avais pas encore proposé ce type d’entreprise : ces fameuses entreprises nées à mission. Elles représentent pourtant le tiers du bataillon des sociétés à mission aujourd’hui. En plus, j’ai dédié un édito au sujet. Donc, l’envie de creuser était forte !
Hublo a donc un an. Certains diront que c’est une start-up. Pas faux, mais pas que. Il y a certes une application, de la technologie, mais il y a aussi du brick-and-mortar avec des pressings et une volonté fièrement affichée d’ultra-proximité.
Avec Stéphane, nous nous sommes plongés dans le choix de créer une entreprise dans le secteur du pressing, ce à quoi il ne prédestinait pas ; dans la volonté que la technologie soit au service des commerces de proximité ; dans le souhait de fonder nativement une entreprise à mission ; dans la difficulté de faire de la R&D à plusieurs dans son secteur ; dans l’envie de faire bouger les lignes dans un secteur où l’écoresponsabilité n’est pas un mantra partagé par tous ; dans le désir de trouver le juste modèle pour se développer en France et à l’international.
Bref, encore une fois, un entretien riche qui pourra répondre aux questions que des aspirants entrepreneurs ou jeunes entrepreneurs peuvent se poser la manière d’intégrer la société à mission quand on est porteur de projet, mais également à des entrepreneurs dans le pressing qui pourraient être intéressés par la démarche d’Hublo.
Alors bonne ou mauvaise idée de créer une société à mission ? Stéphane vous donne son avis. Il se trouve vers la fin de l’entretien. N’y allez pas directement : vous passeriez à côté de tout son raisonnement !
Tu as un parcours plutôt tech. Le choix de fonder une entreprise dans le pressing ne semble pas a priori naturel.
Ce qu'on fait dans le pressing, c'est très tech, en particulier avec notre application.
En plus, le pressing a un côté très technique, contrairement à ce que les gens pensent. En France, le pressing n’est pas une voie favorisée. Donc, les gens qui se retrouvent dedans ont fait peu d'études. Mais quand on y regarde bien, personne ne comprend vraiment comment tout fonctionne. On utilise quand même des produits chimiques. Le détachage, si on veut le faire de façon intelligente, il faut comprendre les réactions chimiques des produits avec les tissus. Il y a des gens qui détachent bien, mais de façon empirique, personne ne comprend vraiment ce qui fonctionne sur quoi.
L’idée était de créer une application pour faire de l'ultra proximité et qu’elle ne soit pas là pour asservir le commerce de proximité, mais pour le servir.
Et pourquoi le pressing ? Je voulais utiliser les nouvelles technologies de style applications pour faire de l'ultra local. Ça fait un petit bout de temps que je réfléchissais à cette idée, mais je n'ai pas eu l'occasion de la lancer. L’idée était de créer une application pour faire de l'ultra proximité et qu’elle ne soit pas là pour asservir le commerce de proximité, mais pour le servir.
C'est pour ça qu'il n'est pas question de lancer une application et de sous-traiter le business à des pressings, mais bien d'acheter des pressings et que l'application soit là pour les servir. Cela aurait pu être un autre business que le pressing. Il se trouve que c'est tombé sur le pressing parce que je trouve qu'il y avait des choses à faire. Mais c'était vraiment l'idée de travailler avec un commerce de proximité, de me rapprocher des besoins réels des clients plutôt que d'en inventer et de mettre une application avec l’idée que la technologie pouvait servir ce commerce de proximité plutôt que l’asservir.
Rapidement, tu parles de l'ultra local qui est vraiment central chez Hublo. D’où vient cet axe ?
C'est sans doute lié au fait d'avoir trop travaillé à l'international, d'être basé dans un pays et de vendre quelque chose à l'autre bout de la Terre, d'inventer des besoins qui n'existent pas et de vendre des choses qu'on aura peut-être dans un an.
Peut-être que tout ça m'a donné l'envie de répondre à de vrais besoins, d’être en B2C, d’avoir cette proximité avec le client final. Je pense aussi qu'on a ces besoins de proximité. Je pense que les gens ont tendance à tous se regrouper ; ils ont besoin de sociabiliser. Ça se fait à travers les commerces de proximité qui créent du lien social.
D'un autre côté, je pense qu’on a besoin de la technologie. Elle est là, mais on doit trouver des moyens pour qu'elle serve la proximité plutôt que le contraire.
Tu as fondé l’entreprise en devenant directement société à mission. Pourquoi ce choix ?
J’étais fatigué des grands groupes qui inventaient des besoins. Par contre, il y avait des choses que j'avais beaucoup aimées. Le fait que dans certaines, même grosses entreprises, d'avoir un patron qui connaissait pratiquement le prénom de tous ses employés, qui s'assurait que les gens étaient formés, que chacun était responsable de ses missions. Ce sont des choses qui étaient intéressantes pour moi. Ça, c'est un point de vue humain.
D'un point de vue écoresponsable, je ne crois pas à un monde où on vend toujours plus. Il est souhaitable et possible de faire de la croissance écoresponsable sans ce que ce soit du greenwashing. Il suffit pour cela de créer des service qui profitent à l’environnement, tout en se rappelant de ne jamais pousser à la consommation et surtout en mesurant l’impact global l’empreinte carbone des services proposés.
Je ne crois pas non plus à des sociétés où tout est drivé par la valeur de l'action, mais plus par la valeur des êtres humains qui sont à l'intérieur. Que ce soit le principe B-Corp aux États-Unis ou les sociétés à mission en France, cela répond tout à fait à ce genre d’aspirations.
Je me suis dit qu'on pouvait utiliser les trois objectifs statutaires que vous avez, qui sont plutôt clairs là-dessus. Le premier, ce sont justement toutes les questions d'investissement R&D pour améliorer les techniques de lavage. On ne se rend pas compte de tout ce qu'il y a derrière. Et ça, aujourd'hui, comment le faites-vous ? Seuls ou en partenariat ?
J'aimerais le faire en partenariat avec d'autres. Au début, j'ai essayé de prendre contact avec d'autres pressings. Dans les télécoms, les gens ont compris que la compétition, c'est bien, mais que si on veut créer plus, il faut aussi faire des associations.
J'ai essayé de prendre contact avec d'autres pressings, mais ça n'a pas trop fonctionné. Un petit peu de push back ou de peur de la compétition. Pour le moment, je travaille beaucoup avec le CTTN [Institut de Recherche sur l'Entretien et le Nettoyage NDLR]. On échange beaucoup sur certaines problématiques.
J'aimerais qu'on enlève complètement le plastique. Pour cela, il faut aussi changer les mentalités des gens dans le pressing, ce qui est complexe.
Ensuite, il y a des choses que nous faisons nous-mêmes. Par exemple, on teste différentes façons d'emballer et de sortir des plastiques pétrochimiques. On est davantage dans la R&D sur des process. J'aimerais bien également déposer des brevets dessus.
J'aimerais qu'on enlève complètement le plastique. Pour cela, il faut aussi changer les mentalités des gens dans le pressing, ce qui est complexe. Je pense qu'on va avoir une étape où on va donner aux gens une housse sous caution qui leur appartiendra. On commence également à proposer l'emballage en plastique biosourcé. Dans l'absolu, c’est très difficile de connaître l'empreinte carbone du biosourcé versus le plastique pétrochimique. Au moins, on sait que le biosourcé a priori est fabriqué en France et on sait qu'il va se dégrader au bout d'un moment.
Ensuite, je travaille beaucoup avec la junior entreprise de CentraleSupelec. Elle m'a aidé à faire l'application. Mais aussi, on travaille sur un calculateur d'empreinte carbone des vêtements de bout en bout, incluant le nettoyage. On travaille également sur un filtre à microparticules plastiques pour filtrer tout ce qui ressort du lavage à l'eau où on a beaucoup de microparticules plastiques. On a toute l'étude pour faire un proto. Il ne nous reste plus qu’à le lancer.
On essaye de faire la R&D à moindre coût pour le moment avec l'idée de déposer des brevets dès qu'on le peut. Mais, ce que je n'aime pas dans l'idée de déposer des brevets, c'est que si on arrive à trouver quelque chose d'intelligent et qu'on dépose des brevets, ça empêche les autres de le prendre et ce n'est pas notre volonté. Si on arrive à déposer des brevets, on communiquera dessus. Mais, je pense qu'on ne le vendra pas, on le partagera. Les sujets de R&D sont des sujets sont très intéressants et on fait tout pour éviter le greenwashing à l'extrême. Si on arrive à avancer sur les filtres à microparticules plastiques, mais que c'est moins écoresponsable de les fabriquer que ce que ça filtre, ça n'a pas d'intérêt.
Prenons un exemple pour parler de l’optimisation des processus pour réduire l’impact écologique avec le calculateur de l'empreinte carbone. Pourquoi l’avoir fait ?
Rien n’existait sur étagère. En plus, il y a pas mal de greenwashing aujourd’hui, que ce soit sur les solvants utilisés par certains, ou sur l’aquanettoyage, qui est peut-être encore pire, vu la quantité d’eau utilisée. Autre point important, c’est le tissu des vêtements qu’on nettoie. Bref, on veut comprendre le cycle de vie dans sa globalité.
Mon objectif, c’est qu’on soit capable, lorsqu’un client vient dans un pressing, d’être un vrai conseil sur quel tissu est le plus écoresponsable, comment éviter de le laver trop souvent etc. On n'est pas là pour essayer de pousser les gens à nettoyer plus. On est là pour pousser les gens à nettoyer mieux, et effectivement, les conseiller comment nettoyer bien quand ils veulent nettoyer. D’où cette volonté de tout comprendre, pour ne pas faire de greenwashing.
Hublo est un maillon de la chaîne. Pas simple de faire changer les mentalités.
En fait, c'est intéressant. C'est pour ça aussi qu'on est dans une logique où il faut qu'on grossisse ; on ne peut pas être petits. Une des choses qui est importante pour faire bouger, c’est mettre de la pression sur nos clients même si ce n’est pas facile. Par exemple, s’il y a des clients qui veulent du plastique alors qu'on leur propose des alternatives et qu'ils ne veulent pas nos alternatives, on doit pouvoir les laisser partir. Par contre, de notre côté, il faut qu'on propose des alternatives qui soient correctes. Si c'est plus cher, on vendra plus cher et on perdra certains clients, on en gagnera d'autres.
J'ai créé tout un tableau en interne en expliquant que le prix était important, mais que je voulais qu’ils respectent des engagements écoresponsables.
L'autre point devrait être plus simple pour nous : c'est de mettre la pression sur nos fournisseurs. On veut des fournisseurs qui sont prêts à s’engager, mais cela reste compliqué de faire passer le message. J'ai créé tout un tableau en interne en expliquant que le prix était important, mais que je voulais qu’ils respectent des engagements écoresponsables. Dans nos achats, cela n’est pas encore un réflexe, d’autant plus qu’en grossissant, on peut tomber dans la précipitation de trouver rapidement un fournisseur.
Ceci étant, on va de plus en plus passer par des appels d'offres. Sur les blanchisseries par exemple. On les utilise beaucoup, parce qu'on ne fait pas les draps ni les nappes. Aujourd'hui, je trouve que la blanchisserie qu'on a choisie est probablement la plus écoresponsable dans le sens où elle est la plus proche de Paris. Il y en a qui sont à 100 kilomètres et qui prennent des camions pour livrer. Ça n'a aucune écoresponsabilité. Là, au moins, on en a une qui est juste au bord de Paris.
Mais j’ai expliqué à nos pressings que l'année prochaine qu’on allait lancer un appel d’offres : les prix seront importants, mais les engagements dans l'écoresponsabilité aussi, par exemple sur le plastique. Plutôt que de nous donner un nouveau sac plastique en nous livrant les draps ou les nappes, ils nous les rendent dans les sacs plastiques dans lesquels les clients nous les ont donnés par exemple. C’est un exemple, mais cela fera partie des critères. Et encore une fois, même s’il y a une différence de prix, il faudra comprendre de combien, et je choisirai celui qui a la démarche la plus écoresponsable dans notre choix de fournisseur.
J’ai l’impression qu’il y a un vrai changement de mentalité à déclencher…
Je suis très transparent, mais dans le pressing, ça va être difficile parce que les gens ne sont pas dans cette mentalité. Mais pour tout ce qui concerne la blanchisserie, je vais y arriver. On commence à avoir des volumes significatifs, ce qui fait qu’on va avoir suffisamment de poids pour que nos demandes soient respectées.
Comment fais-tu pour que tous ces objectifs arrivent à être bien communiqués et respectés par tous les nouveaux arrivants sachant que vous avez pas mal grossi depuis la création de l’entreprise ?
Notre recrutement, au départ, était censé être basé sur les valeurs. On les expliquait en entretien en rajoutant que si les candidats n’y adhéraient pas, cela ne servait à rien de nous rejoindre, parce que cela n’allait pas fonctionner. On a été tellement tendus ces derniers temps sur le recrutement, particulièrement dans les pressings, que je n'ai pas été capable de bien le faire. Ça, ça m'embête.
Néanmoins, ce dont on se rend compte, c'est que si les valeurs ne sont pas partagées, les gens ne resteront pas. Mais, je pense qu'on les rappelle quotidiennement, d'une façon ou d'une autre. Il n'y a pas un jour où on ne fait pas une action dans ce sens. Sur toutes nos décisions, j'essaie qu’elles soient drivées par nos valeurs. Et ici [dans leurs bureaux à Paris NDLR], c'est plus facile parce que je suis là. Dans les pressings, c'est fait petit à petit.
C'est un peu plus long, mais au final, ils adhèrent. Une de nos recrues quand elle est arrivée ne croyait pas à l’idée que les pressings pouvaient être écoresponsables. Aujourd’hui, c'est elle qui porte ce discours aux clients.
Cela m'amène au troisième objectif, qui est justement sur la formation. Cela semble un axe important chez Hublo. Comment l’expliques-tu ?
Plus les gens sont formés, plus ils sont capables de donner des idées, de comprendre, de participer, d’amener des idées qui vont nous faire progresser par rapport à nos valeurs.
Plus les gens sont formés, plus ils sont capables de donner des idées, de comprendre, de participer, d’amener des idées qui vont nous faire progresser par rapport à nos valeurs.
Ensuite, c'est le fait que quelqu'un bien formé, le jour où il n'est pas heureux dans sa boîte, il peut s'en aller. Et je pense que c'est une bonne chose qu’il y ait un turnover sain et que les personnes qui ont fait le tour ou qui ont besoin d’autre chose ailleurs puissent le faire en étant bien formés.
En plus en France, on est super chanceux. Aujourd'hui, on peut former les gens gratuitement. On est poussés par les OPCO à former, donc pourquoi ne pas le faire ? Il faut trouver le temps. Mais ça, c'est de l'investissement. Ce qu'on perd ici, on le gagnera autre part après.
J'imagine qu'avec le positionnement qu'Hublo a aujourd'hui, votre clientèle doit être plutôt alignée avec les valeurs et les messages que vous véhiculez. Ça ne doit pas être trop compliqué de les sensibiliser à tout ce qui concerne l’écoresponsabilité.
Aujourd'hui, tout le monde affirme vouloir plus d'écologie. Mais, je ne suis pas sûr qu'ils soient prêts à essayer de vraiment comprendre ce que ça veut dire. C'est ce que j'aimerais expliquer à travers le calculateur d'empreinte carbone par exemple, c’est qu’ils comprennent vraiment le nettoyage. Cela leur permettrait de comprendre qu’il faut parfois éviter de nettoyer ou comment nettoyer de la façon la plus écoresponsable possible. Mais également, qu’il faut acheter des vêtements qui ont une durée de vie longue avec des matières qui se fabriquent à côté, et pas super loin, et qui ne nécessitent pas des centaines de milliers de tonnes d'eau pour la production etc.
On n'en est pas là. Aujourd’hui, les clients sont d'accord quand on leur dit : "On essaye de mettre moins de plastique". Certains pestent, parce qu'ils ne savent pas comment le transporter chez eux. D’autres saluent l’idée, mais sans comprendre à quel point c'est important ou pas.
Et cette sensibilisation va avec le côté ludique que vous mettez en avant dans votre raison d’être ?
Oui, ça c'est moi qui ne voulais pas dire "technologie", qui préfère le mot "ludique" pour l'application. L'application essaye d'être ludique, et aussi, effectivement, d'apprendre aux gens ce qu’est le nettoyage, comment détacher de façon intéressante.
L'application essaye d'être ludique, et aussi, effectivement, d'apprendre aux gens ce qu’est le nettoyage, comment détacher de façon intéressante.
C’est parfois difficile d’expliquer que nous ne sommes là pour conseiller les clients sur comment détacher, plutôt que de leur dire que c’est trop compliqué et qu’on va détacher le vêtement nous-mêmes pour qu'ils reviennent chez nous.
Quand je t'écoute, ça me fait penser à Alenvi [voir l’entretien avec Guillaume Desnoës pour La Machine à sens]. Ils lancent beaucoup d’actions pour changer le secteur de l’aide à domicile. Et donc ils ont développé une activité de plaidoyer. Et en t'écoutant, je me dis tu pourrais presque être dans cette démarche.
Oui, on aimerait. J’adorerais le faire. Mais je pense que ça ne se fait pas tout seul. Ça se fait avec d'autres pressings. Là, comme je dis, j'avais essayé au départ, c'était un peu difficile. Mais il y en a peut-être qui sont volontaires pour le faire.
Aussi, ce que je trouve intéressant, c'est que ce n'est pas un secteur développé dans le monde entier et que la France pourrait prendre le leadership dessus.
Aujourd’hui, Hublo est parisien avec trois pressings. L'idée, c'est d'aller aussi dans d'autres villes de France ?
On veut que le modèle fonctionne parfaitement bien à Paris. Quand on en aura quatre et qu'on se dira qu’ils sont capables de fonctionner sans que je me mette dedans, c'est que ce modèle sera bien reproductible.
Ensuite, on va aller dans d'autres villes, mais je n’ai pas encore trouvé le bon modèle. Je ne veux pas des franchises parce que cela ne fonctionne pas avec les valeurs d'Hublo. Je trouve que c'est asservissant. Je préfère trouver un modèle de coopérative ou quelque chose comme ça, où si des personnes veulent travailler avec l'enseigne Hublo, plutôt que de nous reverser une dîme quand ça fonctionne bien, ça permet de financer l'augmentation de nos efforts en R&D qui leur seront utiles. Il faut travailler le modèle, mais c'est le but.
Ensuite, on va aller dans d'autres villes, mais je n’ai pas encore trouvé le bon modèle. Je ne veux pas des franchises parce que cela ne fonctionne pas avec les valeurs d'Hublo. Je trouve que c'est asservissant.
Et c’est aussi la logique pensée si on exporte à l'international. A l'international, ce serait bien de trouver une personne qui est responsable sur une ville qui va lancer le modèle, à qui on va apporter toute la R&D qu'on a pu lancer. On va partager l'application, comment on fonctionne d'un point de vue transport avec les vélos par exemple. Je me suis rendu compte que c’était peut-être l’aspect le plus compliqué, ce que j’avais minimisé.
Mais je pense qu'on commence à y être. Tout ça, ce sont des choses qu'on peut effectivement amener comme valeur ajoutée quand on se développe. Mais je veux le développer sur un mode équitable, pas sous un mode pyramidal.
Et ce développement a priori restera en zone citadine ?
On restera sur la proximité, sauf si en R&D, on invente quelque chose qui nous permette de nettoyer dans nos principes et de livrer plus loin ; dans ce cas, on verra. Mais aujourd'hui, d'un point de vue service, on restera dans des villes assez denses, parce que c'est là où ça fait du sens de faire ce qu'on fait. A l’origine, on s’est implanté avec une idée simple : pourquoi, à Paris, alors que le mètre carré vaut une fortune, les gens continuent à entasser des machines à laver et des sèche-linges qui coûtent une fortune et qui leur prennent un mètre carré ? En plus, en France, on change deux millions de machines à laver par an. Pourquoi ne pas mutualiser avec une logique d’ultra-proximité ?
Tu souhaites qu’Hublo croisse, mais de manière organique sans levée de fonds. C’est assez étonnant, surtout en ce moment où, toutes les semaines, il y a des annonces de levée de fonds extravagantes. Qu'est-ce qui motive ce choix ?
Au départ, la non-connaissance de la levée de fonds. J’essaie de ne pas aller sur des choses que je ne maîtrise pas. La levée de fonds, je ne maîtrisais pas. Et aussi, j'ai vu beaucoup de gens qui, plutôt que de monter leur entreprise, perdent leur temps à aller chercher de l'argent. Je ne veux pas faire de mon métier perdre mon temps à aller chercher de l'argent et d'être content quand j'ai trouvé de l'argent. Ce n'est pas ça qui me rend heureux. C'était la première chose.
Je ne veux pas faire de mon métier perdre mon temps à aller chercher de l'argent et d'être content quand j'ai trouvé de l'argent. Ce n'est pas ça qui me rend heureux.
J'avais un peu d'argent aussi au départ, c'était une chance. Donc je n'avais pas besoin d'aller en chercher pour lancer. Et pour le moment, on se rend compte que nous n'en avons pas besoin. Mais on verra, et si ce jour arrive, il faudrait trouver un fonds à impact. Tant qu'on peut trouver un modèle où on croît de façon organique, je veux continuer de cette manière.
Souvent, dans les levées de fonds, il y a toute cette stratégie derrière que je n'aime pas qui est de dire : « On vend à perte. En vendant à perte, on achète le marché et winner takes all ». Ces stratégies ne peuvent pas aller avec une société à mission, selon moi.
Dernière question, ça fait un an maintenant qu'Hublo a été lancé. Si un primo-entrepreneur ou un entrepreneur te lisait, qu'est-ce que tu lui donnerais comme conseil pour justement démarrer son entreprise à mission ?
Ne pas écouter les gens. Prenez de l'expérience partout, même s’il y a des personnes qui diront que c’est trop compliqué. Il faut avoir confiance en ce qu'on fait. Surtout ce que je crois, c'est que chacun a sa personnalité et que c'est difficile de donner un conseil.
Je pense aussi que si on ne croit pas dans les valeurs d'une société à mission, il ne faut pas y aller. C’est important de vraiment y croire et s'assurer, que tous ceux qui sont dans la société soient fédérés autour de ces valeurs. Si les gens ne se fédèrent pas autour de ces valeurs, on n'y arrivera pas. C'est peut-être pour ça que c'est plus sympa de créer une société à mission parce qu'on peut s'assurer que les gens qui rentrent dedans portent effectivement ces valeurs.
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Vivien.