#80 Décryptage de la mission de Gerep
Analyse de sa raison d'être et de ses objectifs statutaires (Temps de lecture : 6 minutes)
Chère lectrice, cher lecteur,
Bienvenue dans ce 80e décryptage de mission. En arrivant sur ce nombre rond, je me suis demandé depuis quand j’avais commencé ces décryptages. D’une manière plutôt structurée, cela fait deux ans ! Le tout premier était sur Aigle (c’était bien moins structuré…). Ils ont beaucoup changé depuis le temps ; je cherche toujours à ce qu’ils soient le plus utile possible pour vous afin d’en faire une ressource unique en son genre.
Si vous avez des idées pour que je m’améliore encore, vous pouvez me les partager, soit en commentaires de cette missive, soit en répondant directement à l’email que vous recevez.
Cette semaine, le vote a été remporté par Gerep (Groupe Européen Retraite Prévoyance).
Pour le prochain décryptage, vous avez le choix entre Maped (fournitures scolaires) et Certivea (certification, BTP).
Voici leurs raisons d’être :
Maped : “Donner à chaque enfant le pouvoir de changer le monde avec ses mains”
Certivea : “Agir en certificateur engagé pour des cadres de vie durables”.
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Quelle balade folk ! En parlant de mieux vivre dans la raison d’être du jour, j’ai découvert “The Better Life” de Jon and Roy, un morceau enchanteur. Une mélodie simple mais efficace, une voix un peu rocailleuse mais chaleureuse. Elle s’écoute en boucle !
Gerep est un courtier en assurance collective créé en 1989. L’entreprise est active sur les sujets de protection sociale, de prévoyance, de retraite et d’épargne salariale. Ce qui est assez étonnant et qui montre que la société à mission commence à toucher d’autres types d’entreprises, c’est que Gerep communique très peu sur ses engagements en dépit de pas mal le faire sur ses offres ou sur l’actualité de son secteur.
Passons au décryptage.
La raison d’être
Développer des solutions et des services innovants et à impact pour contribuer à la performance sociale des entreprises et au mieux vivre des personnes assurées.
Cette raison d’être est claire. Le choix des mots permet de comprendre subtilement l’activité de l’entreprise.
La structure est assez classique, mais elle permet ici de faire ressortir un certain nombre d’éléments forts : offre « innovante et à impact », « performance sociale », « mieux vivre ». C’est engageant, car ce sont des concepts qui nécessitent d’être mesurés pour être incarnés et qui appellent à une amélioration continue.
Je trouve assez astucieux de distinguer les clients directs (les entreprises) et les bénéficiaires (les salariés). Cela indique bien la double relation que Gerep entretient et la nécessité de les considérer au même niveau dans le développement de l’activité. Bien que l’enjeu social concret auquel l’entreprise souhaite contribuer n’est pas très explicite, on peut aisément concéder qu’une meilleure prise en compte des enjeux RH des entreprises et un meilleur mieux vivre des salariés est positif pour la société.
L’utilisation du terme « impact » est un peu piégeux dans une raison d’être. Il est assez galvaudé aujourd’hui. En outre, la structuration de la raison d’être fait que c’est un raisonnement en cascade. Pour mesurer l’impact des offres, il faut d’abord définir et mesurer les notions de performance sociale et de mieux vivre.
C’est peut-être un des écueils de cette raison d’être. Si l’on peut intimer ce que « mieux vivre » signifie, la notion de « performance sociale des entreprises » est plus floue.
Autre point qui aurait pu être approfondi, c’est le début : « développer des solutions et des services innovants et à impact ». C’est assez générique. Gerep aurait pu se contenter d’une raison d’être commençant par « contribuer à… ». Sinon, il aurait fallu davantage faire ressortir des éléments explicites et distinctifs de l’entreprise. En 35 ans d’existence, elle a forcément développé des traits identitaires uniques. Elle évoque par exemple régulièrement l’aspect « sur mesure » ou l’adaptabilité qui aurait pu être mis en avant.
Enfin, je pense que cette raison d’être aurait été plus puissante dans le sens inverse : « Contribuer à la performance sociale des entreprises et au mieux vivre des personnes assurées par le développement de solutions et de services innovants et à impact ».
Les objectifs
Conforter les employeurs sur leur rôle sociétal et les accompagner dans le dialogue social
La formulation de cet objectif est étonnante. Pourquoi parler de « conforter » ? On partirait du postulat que la grande majorité des entreprises est déjà consciente de ce rôle. Est-ce vraiment le cas ? Par ailleurs, on parle ici de sociétal, pas de social, que l’on pourrait associer à la QVT, au mieux vivre. L’introduction de ce terme crée une certaine confusion, d’autant qu’il n’est pas du tout commun dans le langage de l’entreprise (il n’y a aucune occurrence en français sur le site Internet).
L’accent mis sur le dialogue social est intéressant. Certes, les offres actuelles de Gerep couvrent en partie des aspects du dialogue social, sur la protection sociale, la politique de rémunération, mais en tant que courtier en assurances, il n’en couvre qu’un champ limité. Si l’on pousse la logique à fond, cela pourrait amener une transformation profonde de l’entreprise.
Etre une plateforme d’innovation et d’agrégation de services pour faciliter la vie des assurés
Cet objectif est centré sur l’aspect digital de Gerep et les services mis à disposition des assurés. La question est de savoir : leur faciliter la vie, c’est très bien, mais cela répond-il à la notion de « contribuer… au mieux vivre des personnes assurées » ? En soi, cet objectif passe un peu à côté de la cible. Cela s’illustre également par la forme qui n’est pas marquée par un verbe d’action ; elle illustre davantage un constat.
Faire avancer le débat public sur la protection sociale pour améliorer son efficacité
Bien que cette dimension de plaidoyer soit très utile, elle est introduite de manière assez floue. La raison d’être ne parle pas de protection sociale et la formulation de l’objectif ne permet pas de bien faire le lien entre la participation au débat public et l’amélioration de l’efficacité de la protection sociale.
Également, cette formulation ne facilite pas le pilotage. Gerep devra prouver comment ils font avancer le débat public (et pas juste en comptabilisant le nombre d’événements auxquels ils participent) et comment ce débat public améliore l’efficacité de la protection sociale. Assez tortueux !
Agir dans son écosystème pour générer un impact social et environnemental positif
Cet objectif semble relever de la RSE. Comme il est peu clair du fait de sa formulation très globalisante, on peut y mettre à peu près n’importe quelle initiative. Surtout, il ne renforce pas la raison d’être. En l’état, il ne sert pas la mission.
Au global
✅ La mission ouvre des portes d’amélioration, de progrès, de changements pour l’entreprise et par rapport à ses parties prenantes.
✅ Si on prend la mission à la lettre, l’ambition est très engageante et potentiellement puissante.
📶 Il n’y a pas une totale cohérence entre la raison d’être et les objectifs. Les termes de “performance sociale des entreprises” et de “mieux vivre” sont trop peu explicités pour savoir s’ils sont bien couverts par les objectifs.
📶 Plusieurs des objectifs pourraient être reformulés afin d’être davantage complémentaires. Le second se focalise trop sur les outils digitaux pour comprendre le lien avec la raison d’être, le troisième manque de clarté, le dernier ne relève pas de la mission.
Cet exercice d’analyse se veut pédagogique pour toute entreprise souhaitant devenir société à mission ou en cours de transformation. Je m’évertue à être critique MAIS constructif.
Vous pouvez retrouver toutes les missions déjà analysées ici et mes 16 conseils pour passer société à mission ici.
Et si besoin, je suis à disposition pour échanger avec l’entreprise analysée.
Merci de votre lecture ! J’espère que ce décryptage vous aura plu. Vous pouvez le signaler en appuyant sur le ❤️. Retrouvez les 79 premiers décryptages ici.
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A demain,
Vivien.