#71 Décryptage de la mission du Groupe Viviany
Analyse de sa raison d'être et de ses objectifs statutaires (temps de lecture : 6 minutes)
Chère lectrice, cher lecteur,
Voici l’avant-dernier décryptage de mission de l’année 2022. Déjà ! A un vote près, vous avez sélectionnez le Groupe Viviany, entreprise de BTP installée dans la Drome.
Mais avant de passer au décryptage, voici le dernier vote de l’année. Il est un peu particulier, puisque c’est vous qui avez choisi les entreprises de cette liste ! Merci à celles et ceux qui m’ont communiqué leur proposition. J’ai dû faire une petite sélection pour me limiter à 5—Substack ne permet d’offrir plus de choix. Vous avez donc le choix entre Birdeo (cabinet de recrutement), Frey (foncière), Helios (banque), Sézane (marque de mode) et Treebal (messagerie instantanée). A vous de choisir !
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Voilà une chanson qui part de mobilité et d’horizons avec un texte taillé au couteau. Magnifique !
Le Groupe Viviany est une ETI de près de 700 collaborateurs installée à Montélimar. Presque séculaire, le groupe se présente comme une confédération de neuf entreprises réunissant des croissances externes réalisées au fil des décennies et des créations d’entreprise à partir d’activités internes. Cette particularité est notable, car chaque société dispose d’une complète autonomie.
La question est donc de savoir comment va se décliner la société à mission dans le groupe, décision entérinée cet été. En effet, c’est la holding qui est passée société à mission. Nous y reviendrons dans la partie “Au global”.
La raison d’être
« Notre ambition est d’œuvrer durablement pour le développement des territoires afin d’offrir aux populations de meilleures conditions de vie et de mobilité.
Nous sommes fiers de notre métier de constructeur engagé, de nos savoir-faire et des ouvrages que nous léguons aux futures générations. »
La raison d’être en deux phrases n’est pas fréquente, mais peut être une solution pertinente pour distiller toutes les idées que l’on souhaite véhiculer. Elle aura une vocation marketing plus limitée, mais toutes les entreprises ne souhaitent pas forcément que leur raison d’être soit la première phrase qu’un commercial utilise ou qui arbore le “header” du site Internet.
La raison d’être est claire et on comprend rapidement les thématiques que le groupe souhaite traiter : “le développement des territoires”, “les conditions de vie et de mobilité”, les “générations futures”. Le tout en étant des “constructeurs engagés”, terme suffisamment large pour englober les différents métiers du groupe.
La formulation est assez factuelle en allant au-delà d’une raison d’être très terre à terre. La dimension sociétale est apparente. L’ancrage local est bien marqué et conforme au développement régional du groupe.
On ressent une volonté d’avoir une première phrase plutôt tournée sur la contribution dans la société et une seconde davantage tournée sur l’interne. La notion de fierté me rappelle la raison d’être du Groupe Cheval, entreprise voisine dans les travaux publics. On perçoit la volonté de rappeler l’utilité sociétale de métiers trop peu valorisés.
Sur le papier, ce n’est pas forcément une raison d’être qui semble tirer l’entreprise vers des horizons nouveaux, mais il est possible également que ce passage en société à mission corresponde soit à une volonté d’exprimer davantage ce que l’entreprise fait ou au contraire de progresser sur la prise en compte des enjeux sociétaux et environnementaux dans ses activités. En effet, le groupe communique peu sur ces sujets. Ces filiales n’arborent pas d’activité a priori directement en lien avec la transition, si ce n’est sur le désamiantage et la dépollution. Précision importante : bien que le groupe communique sur des réalisations en lien avec des enjeux sociétaux et environnementaux, elle le fait peu sur la manière dont elle réfléchit à améliorer ses activités directes en lien avec ces enjeux. Je caricature à dessein, mais on peut rénover un réseau d’eau potable tout en menant un chantier très polluant et en perturbant durablement la biodiversité.
Les objectifs
Offrir des conditions de travail et d’épanouissement à l’ensemble des salariés
Je suis toujours embêté par ce type d’objectif, qui me semble assez générique et évident. Il correspond davantage à un moyen qu’à une fin. Par ailleurs, la tournure laisse penser qu’il y a un problème de formulation : offrir quelles conditions de travail ?
Mon conseil : de nombreuses entreprises à mission souhaitent avoir des objectifs tournés sur l'interne. Privilégiez des objectifs qui servent vraiment votre mission et renforcent votre raison d'être : formation, style original de management, employabilité etc., autant de sujets que vous souhaitez pérenniser. Les sujets de QVT et de bien-être au travail sont avant tout des questions de bonne gestion d'entreprise et de juste considération des collaborateurs.
Réduire l’impact de nos activités
On imagine qu’on parle des impacts négatifs, sans forcément savoir lesquels—il sera important de clarifier ce point dans le modèle de mission. Je trouve que cet objectif aurait mérité d’être tourné de manière positive. En l’état, on a plutôt l’impression que l’entreprise va chercher des solutions pour faire moins mal, pas pour faire mieux. C’est une question de forme, mais comme disait Victor Hugo, “la forme c’est le fond qui remonte à la surface”. Cela guidera forcément le type d’indicateurs suivis.
Participer à l’attractivité, au développement et à la vie des territoires
Cet objectif me parait flirter avec les aspects de soutien à des initiatives locales et de mécénat, qui ne sont pas très pertinents dans le cadre de la mission, car ils ne concernent pas l’activité de l’entreprise. En effet, rappelons que la mission doit être en lien avec l’activité de la société.
Peut-être l’objectif recouvre-t-il une autre réalité, mais ce n’est pas très clair, ce qui risque d’affaiblir son pilotage et son évaluation.
Les statuts précisent deux autres objectifs qui n’apparaissent pas sur le site de l’entreprise :
S’engager dans la durée, prendre soin de nos parties prenantes et les accompagner dans leur développement
Cet objectif n’est pas très clair. Que veut dire “s’engager dans la durée” ? Pour quoi ? Le terme de “parties prenantes” sans détail est très large et peut ainsi concerner les équipes, les partenaires, les fournisseurs, les clients, les riverains, les futurs usagers de leurs ouvrages etc.
Promouvoir un comportement éthique et éco-responsable dans notre action quotidienne
L’usage du terme “éthique” n’est pas du tout fréquent dans les missions. Ce sera intéressant de voir comment cela se décline. La formulation d’un “comportement éco-responsable” est plus positive que le second objectif. Toutefois, le terme “comportement” est trop faible. Il ne faudrait pas que cela se limite à des éco-gestes de tri, ou à de l’efficacité énergétique, mais également des réflexions profondes sur les activités.
Au global
✅ Une raison d’être claire et compréhensible, qui s’intègrera bien au type de communication de l’entreprise.
✅ On perçoit une volonté d’acter certaines réalisations, mais également d’affirmer un positionnement engagé, qui appelle à assumer ses responsabilités.
📶 La cohérence entre la raison d’être et les objectifs est partielle. Les objectifs reflètent plutôt une démarche RSE, mais comment cette mission va-t-elle modifier les activités du groupe et participer à aiguiller la stratégie du groupe ? A titre d’exemple, la raison d’être parle “d’offrir aux populations de meilleures conditions de vie et de mobilité”. Les objectifs sont peu diserts sur ce sujet.
📶 L’objectif “Réduire l’impact de nos activités” est générique. Est-ce sur les enjeux environnementaux, sociétaux, sociaux ? Tous ? Certes, un objectif doit rester assez global pour être pérenne, mais il doit être suffisamment spécifique pour pouvoir guider les efforts.
⚠️ Petit point d’attention : cette mission pourra s’appliquer à toutes les filiales du groupe. Ainsi, dans la déclinaison, il faudra que chaque filiale déploie ses feuilles de route avec un modèle de mission consolidé et cohérent au niveau du groupe. Comment cela se conjugue-t-il avec l’autonomie complète de chaque filiale ?
Mon conseil : Dans la gouvernance de la mission, il pourrait être pertinent d’envisager d’avoir une sorte de “référent mission” dans chaque filiale pour être au plus près du terrain, même s’ils ne font pas tous partie du comité de mission. Mais, ils peuvent être ponctuellement invités et rapportés au manager de mission groupe.
Cet exercice d’analyse se veut pédagogique pour toute entreprise souhaitant devenir société à mission ou en cours de transformation. Je m’évertue à être critique MAIS constructif.
Vous pouvez retrouver toutes les missions déjà analysées ici et mes 16 conseils pour passer société à mission ici.
Et si besoin, je suis à disposition pour échanger avec l’entreprise analysée.
Merci de votre lecture ! J’espère que ce décryptage vous aura plu. Retrouvez les 70 premiers décryptages ici.
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Vous ressentez le besoin d’être accompagnés sur la définition, l’affinage ou le pilotage de votre mission ?
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A demain,
Vivien.
Bonsoir Vivien,
Je découvre votre Newsletter, poussée par un client. Je suis ravi que la raison d'être du Groupe Viviany ait trouvé grâce à vos yeux. Ouf ! Nous en sommes les accoucheurs !
Au plaisir de partager,
Guillaume Vigouroux / Marsatwork