#3 La société à mission prend sa place au gouvernement
Olivia Grégoire, rapport Strength of Purpose, Truffaut, Vincent Frambourt et Tristan Mourre,
Les vacances commencent, mais on garde le cap avec une newsletter plus légère et pleine de notes positives.
Du côté du politique…
Olivia Grégoire vient d’être nommée secrétaire d’Etat à l’économie sociale, solidaire et responsable. C’est une excellente nouvelle pour le statut d’entreprise à mission. Députée LREM depuis 2017, elle a fait de l’essor des sociétés à mission un cheval de bataille. Elle a notamment pris position au travers d’une tribune dans Les Echos et d’un entretien croisé avec Pascal Demurger dans La Tribune.
Dans cet entretien, elle expose un projet qu’elle devrait porter depuis Bercy : intégrer la performance extra-financière dans le bilan comptable. La valeur d’une bonne note ESG serait concrète. Elle cite quelques exemples : accès facilité aux marchés publics, taux d’intérêt plus bas pour des prêts, voire moins d’impôts. Loin d’être fait… Surtout, elle devrait porter ce projet au niveau européen. Si le statut n’existe pas à l’échelle européenne, l’idée d’un standard unique de notation de la performance extra financière est en discussion.
Du côté des entreprises…
Commençons par une enquête réalisée par le Zeno Group, un groupe international de communication. Vous verrez, j’aime beaucoup les enquêtes.
Dans une étude publiée il y a quelques semaines intitulée “The 2020 Zeno Strength of Purpose”, l’entreprise a interrogé 8000 consommateurs dans huit pays différemment. Pas de surprise : l’importance d’une mission est largement mise en avant par les répondants. Les éléments que je retiens :
les attentes sur le sujet sont communes au niveau global, non seulement en Europe, mais également en Amérique du Nord et en Asie. C’est une attente partagée par 94% des répondants : les entreprises avec lesquelles elles ont une relation commerciale doivent avoir une mission (purpose). Et même 83% estiment qu’une entreprise ne devrait faire du profit que si elle peut démontrer l’impact positif de son activité. Bon courage…
Huit répondants sur dix ont déjà mené une action en faveur d’une entreprise dans laquelle ils croient : partager la bonne parole, évangéliser son entourage ou effectuer un achat. Sans surprise, c’est très fort chez les moins de 40 ans. Cela semble toutefois une pratique moins fréquente en France avec seulement 69% des répondants ayant déjà fait une des actions citées.
La mission doit être inspirante. Pour 62% des répondants, cette mission doit être alignée avec leurs valeurs. C’est un vrai défi pour une entreprise de pouvoir faire cela : soit, elle accepte délibérément de s’adresser à une niche, soit, elle embrasse une mission très vaste, au risque qu’elle sonne creux.
Enfin, le PDG doit être moteur pour porter et promouvoir la mission. C’est une évidence, mais qui n’est pas partagée unanimement. En France, seuls 65% des répondants abondent dans ce sens - contre 90% en Inde et 77% au Royaume-Uni. J’avoue être surpris par ce faible résultat. Si le PDG ne le fait pas, on peut difficilement l’attendre des collaborateurs (principe d’exemplarité) ou des actionnaires (ils ont le PDG qu’ils méritent…).
Autres infos
Gilles Mollard, président de Truffaut, récemment devenue entreprise à mission, a donné une interview à CBRE dans laquelle il revient sur l’importance d’une culture d’entreprise forte pour traverser les crises.
Du côté des idées…
Vincent Frambourt, Associé, et Tristan Mourre, Directeur RSE chez Grant Thornton, ont publié une tribune intéressante pour Option Finance. Ils viennent alimenter le débat que j’ai ouvert la semaine dernière sur la complémentarité entre le label B Corp et l’entreprise à mission. Ils expliquent que les deux engagements participent de la même logique : privilégier une démarche volontariste (indicateurs intégrés dans le pilotage de l’entreprise) plutôt qu’une vérification a posteriori. Judicieuse manière de présenter les choses, je trouve !
Pour eux, ces deux outils sont complémentaires.
Tandis que le statut d’entreprise à mission permet de s’inscrire dans un cadre juridique français et d’impliquer les actionnaires à long terme, l’obtention de la certification indépendante B Corp envoie un message fort au consommateur final et permet de bénéficier d’une certification internationalement reconnue.
Je pense que cette approche est en effet viable pour des grands groupes qui peuvent payer le double reporting induit par chaque engagement. Ce sera plus difficile pour des entreprises moins grandes. Par ailleurs, le label B Corp continue de se développer, mais reste surtout connu outre Atlantique. Le consommateur n’est pas toujours au fait de tous les labels et surtout ce qu’ils impliquent. Mais, il est vrai que c’est l’argument mis en avant par Danone pour obtenir la certification B Corp. Et enfin, je suis embêté par l’approche défendue qui laisse penser que seules les entreprises en B2C auraient intérêt à opter pour le label B Corp. Idem pour l’entreprise à mission qui n’aurait d’intérêt que pour les actionnaires. Dans les deux cas de figure, c’est avant tout une démarche de l’entreprise vis-à-vis d’elle-même : cela définit le rôle qu’elle a envie de jouer dans la société peu importe sa structure actionnariale ou qu’elle soit en B2B ou en B2C (ou autre).
Bref, les deux sont évidemment complémentaires, même si certaines entreprises privilégieront un engagement plutôt que l’autre. L’important est déjà que les entreprises s’engagent dans une voie vertueuse et pérenne.
C’est tout pour cette semaine.
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À la semaine prochaine !