#11 La loi PACTE continue de séduire grandes et petites entreprises
Deux nouvelles entreprises à mission (petites entreprises) et deux grands groupes publient leur raison d'être et plein d'autres infos
Bonjour,
Je ne sais pas comment vous vivez toute cette situation sanitaire. C’est une sorte d’ascenseur émotionnelle permanent. Dans ce contexte, une raison d’être, une vision claire de son entreprise, voire une mission définie, peuvent être très utiles pour fédérer les équipes, prendre les bonnes décisions et surtout les faire comprendre en interne et auprès de toutes ses parties prenantes. Juste une idée pour commencer cette missive.
Au sommaire cette semaine :
Alcool et mission font bon ménage
De même que mission et aide à la personne
De très grands groupes affichent leur raison d’être
Patagonia vise au niveau de la ceinture pour inciter les Américains à voter !
Quelques outils dans la boîte à outils de la raison d’être et du comité de mission
L’émergence des “cygnes verts”
L’après raison-d’être, vraiment ?
Bonne lecture ! Et pour ceux qui ne sont pas abonnés, cette missive peut arriver directement dans votre boîte tous les vendredis après-midi. Il suffit de vous abonner !
Qui a dit qu’alcool et mission ne pouvaient pas faire bon ménage ? La brasserie francilienne Deck & Donohue devient entreprise à mission. Extrait choisi de la mission :
Nous existons pour créer des expériences gustatives inspirantes, porteuses de sens et créatrices de liens. Nous voulons que notre entreprise joue un rôle social et environnemental positif en valorisant des modes d’approvisionnement, de production et de consommation responsables et durables.
Si c’est une première pour une entreprise productrice d’alcool d’adopter le statut de société à mission, Deck & Donohue rejoint Terra Hominis, plateforme de crowdfunding pour vignerons, dont je parlais dans une précédente missive. De même, le label B Corp a lui aussi été adopté par plusieurs fabricants d’alcool, en allant de la bière au vin jusqu’au whisky en passant par le gin. On peut produire de l’alcool et être responsable…
Ce n’est pas fini pour les annonces d’entreprises à mission, puisqu’Alenvi, entreprise spécialisée dans l’accompagnement des aides à domicile, a officiellement endossé le statut d’entreprise à mission suite à nouvelle levée de fonds. J’avais l’impression que c’était déjà le cas en fait !
J’ai oublié de l’évoquer ces dernières semaines : Patrick Caine, PDG de Thales, a publié une tribune remarquée sur son compte LinkedIn pour évoquer la raison d’être du groupe : “Construire ensemble un avenir de confiance”. Je n’ai pas l’impression que ce soit une raison d’être statutaire (corrigez-moi si je me trompe), mais l’entreprise n’a toutefois pas négligé la portée de l’exercice, puisque Patrick Caine affirme que la moitié des 83 000 collaborateurs du groupe ont participé. Disons plutôt que la démarche a été véritablement ouverte. Je vous en recommande la lecture et en voici un extrait choisi :
Soyons humbles : Thales, à lui seul, ne se prétend pas l’alpha et l’oméga de la confiance.
D’autres entreprises fondent d’ailleurs, elles aussi, leur raison d’être sur cette notion de confiance. C’est bien là le signe de l’importance de cet enjeu sociétal. Le défi est tellement important que nous devons tous nous atteler à le relever, chacun à travers ses moyens.
Ce moment si particulier que nous traversons est, je crois, l’occasion pour les entreprises de démontrer la validité et l’authenticité de leur raison d’être, tout particulièrement en termes de responsabilité. Cette responsabilité de l’entreprise dont on parle depuis des années, objet de tant de rapports, d’ouvrages, de proclamations, cette période nous oblige à la mettre à l’épreuve des faits, à transformer les mots en actes et, par là même, à entrer dans une nouvelle ère.
Aujourd’hui, ne plus se positionner sur des enjeux de société n’est plus perçu comme de la simple neutralité. Ne pas dire que l’on est en faveur de quelque chose revient désormais à y être opposé. C’est un vrai changement par rapport aux décennies précédentes.
La Macif vient, elle aussi, de publier sa raison d’être : “nous mobilisons nos valeurs mutualistes et nos savoir-faire pour protéger le présent et permettre l’avenir, pour nous tous et les générations futures”. Comme pour Thalès, c’est le fruit d’un grand travail consultatif en interne. Le communiqué de presse détaille également les promesses vis-à-vis des différentes parties prenantes internes et externes.
Cela ne m’arrivera pas souvent pas d’évoquer un article de Paris Match, alors j’en profite. Portrait et perspectives du skipper François Gabart, plus connu pour ses exploits en mer que son entreprise Mer Concept. Et pourtant ! Elle est devenue société à mission il y a peu (témoignage de François Gabart il y a quelques mois sur le sujet).
Des jeans voués à être collector ! Patagonia incite à aller voter… sur ses vêtements. Génial !
On continue dans la rivalité amicale entre B Corp et entreprise à mission. Le fonds d’investissement Sycomore AM, déjà entreprise à mission, vient d’être labellisé B Corp. Mais pourquoi vous demandez-vous ? Eh bien, parce que le label B Corp est une reconnaissance externe qui leur permettra d’identifier des axes d’amélioration en tant qu’entreprise à mission. Une belle complémentarité en somme…
Cette labellisation est une reconnaissance externe de la démarche d’entreprise à mission. L’évaluation associée est l’occasion d’identifier des axes d’avancement concrets au service de la mission de Sycomore AM.
Citation de la semaine
“Bigger businesses especially have to be on a journey towards being purposeful - if you are not - you simply have no chance. […] Nobody is that stupid to think ‘this is going to blow over’ or ‘let’s just carry on like before’. They know what they have to do, they have to start to deflect what is coming at them. If they ‘green-wash’ they will get caught out. People are sharp, young people are sharp.” (Wayne Hemingway dans Forbes)
La boîte à outils
L’avocat Errol Cohen a publié un papier dans Les Echos explicitant le fonctionnement du comité de mission. Un bon tour d’horizon pour avoir tous les enjeux à l’esprit.
Gilles Reeb, de l’agence Uzful, donne quelques conseils pour construire la raison d’être de l’entreprise. Cela tourne beaucoup autour de la co-construction.
Le Réseau des Professionnels du Numérique de Nord-Aquitaine (SPN) organise une visio vendredi prochain (2 octobre) sur la raison d’être et le statut de société à mission. Inscrivez-vous ici. Attention, les places sont très limitées.
Du côté des idées
Vous connaissiez les “cygnes noirs” de Nassim Nicholas Taleb. Découvrez les “cygnes verts” de John Elkington.
Un petit mot caustique du consultant Christophe Faurie : si on parle d’entreprise à mission, ça veut dire qu’il y a des entreprises sans mission ? Je ne le sens pas très partisan du statut… Je ne peux que lui conseiller l’ouvrage de Pascal Demurger pour qu’il comprenne que l’entreprise a un rôle politique au sens noble du terme, ce qui a pu être historiquement le cas, mais ne l’était plus vraiment depuis plusieurs dizaines d’années.
Il paraîtrait que nous soyons déjà en préparation de l’ère “de l’après raison-d’être”.
Je n’ai pas accès à l’interview, donc je ne commente que cette déclaration avec un manque évident de contexte. Mais, ne serait-il pas plus judicieux d’être déjà dans l’étape de la raison d’être ? Si ce concept était bien ancré dans les débats et apparaissait comme une évidence, je trouverais cela intéressant. En l’occurrence, je trouve que c’est prématuré…
Il y a des sujets que je suis en filigrane avec cette newsletter, l’un d’eux est la question de maintenir sa mission ou son label B Corp en cas de fusion-acquisition ou de levée de fonds. Hilary Dessouky, la directrice juridique de Patagonia, a donné une interview assez généraliste sur les B Corps. Un point a attiré mon attention. Dans le cas d’une fusacq, le label B Corp pourrait amener les actionnaires à ne pas se tourner vers l’offre la plus élevée, mais celle qui correspond le plus aux attendus en termes d’engagements environnementaux, sociaux et sociétaux.
C’est tout pour cette semaine. Si vous voyez passer des infos, articles ou ouvrages que je devrais absolument partager, n’hésitez pas à me le signaler par réponse à cette missive ou via Twitter. Un grand merci d’avance pour vos likes et partages !
A vendredi prochain,
Vivien.